La Frauenkirch, énigmatiques ruines d’une église médiévale à Offwiller

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Frauenkirch – vestiges de la tour d’escalier et du chevet

Sur les hauteurs de la commune d’Offwiller, en bordure de la route dans la continuité de la rue de Hanau-Lichentberg, se dressent encore fièrement les vestiges remarquables d’une église médiévale. Ses pans de murs défiant les siècles sont les fragiles supports, auxquels s’agrippe inlassablement le lierre. La vision de ces ruines caressées par les branchages, n’aurait pas manqué d’inspirer peintres et poètes romantiques. De ces lieux chargés d’histoire nous ne pouvons que supputer l’insondable passé. Bien qu’elle conservera pour toujours ses mystères, nous vous proposons ici de nous pencher sur les faibles éléments qui ont forgé la tradition populaire auréolant la Frauenkirch.

État de conservation de la Frauenkirch

Les maigres restes de la Frauenkirch nous laissent encore deviner ce que fut le lieu à son origine. Le tracé des murs au sol évoque une Hallenkirche, c’est à dire une église-halle. Sa nef, et ses bas-côtés semblent avoir formé un espace uniforme. Seules des colonnes, dont subsistent çà et là quelques tronçons, séparaient les vaisseaux de l’édifice. Un chapiteau de l’une de ces colonnes fut déposé en 1868 à l’hôtel de ville de Niederbronn, puis au musée de la même ville.

S’il ne subsiste en élévation que quelques assises de la nef, on note qu’elle s’ouvrait, par un arc triomphal relativement étroit, sur un chœur orienté, de plan semi-décagonal. De même largeur que l’ensemble de l’édifice, l’espace du sanctuaire est occupé en son centre par les fondations d’un autel rectangulaire. Le chœur donne accès au Nord à un espace réduit, conduisant lui même à une tourelle d’escalier.

La tourelle ainsi que quelques portions de murs adjacents constituent l’élément d’élévation le mieux conservé. Le départ d’un escalier en vis est toujours visible. Il faisait très vraisemblablement partie d’une tour-clocher.

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Frauenkirch – vue d’ensemble

Un grand nombre de fragments de profils en grès aux courbes ogivales, l’emploi de colonnes rondes massives, ainsi que la présence d’une clef de voûte sculptée (également déposée à Niederbronn en 1868), nous indiquent que l’ensemble de l’édifice était couvert de voûtes à croisées d’ogives.

Les parties externes de la ruine nous présentent les fondations d’éléments de contrebutement au niveau de la nef. Le chevet de l’église et ses contreforts ont, quant à eux, bénéficié d’un soin particulier caractérisé par la présence de moulures formant plinthes.

Il ne nous reste des toitures que quelques fragments de tuiles plates en terre-cuite, présentant une extrémité angulaire ; il s’agit là de la version ancienne de la tuile traditionnelle alsacienne : le Bieberschwanz (queue de castor).

 

L’ensemble des vestiges trahit une architecture gothique, et l’on situe sa construction tantôt au XIIIe siècle, tantôt au XIV-XVe siècles. Vu le style des éléments conservés, la deuxième hypothèse est celle à laquelle nous nous rattachons. L’édifice est du reste cité pour la première fois en 1450 (cf notice de la Base Mérimée)

Une église conventuelle ?

Le prêtre archéologue Jérôme Anselme Siffer a été l’un des érudits les plus attachés à redécouvrir et à faire connaître ces vestiges, et ce dans les années 1860. Il nous raconte que le nom de Frauenkirch, n’est que l’appellation vernaculaire de l’édifice, dont on ne connaît guère la destination originelle. Le monument a peut-être été édifié par les Hanau-Lichtenberg, sans que cela soit une certitude. Par ailleurs le vocable sous lequel la Frauenkirch était placée à l’origine est également inconnu, en dépit son nom populaire.

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Frauenkirch – fondations de l’autel

Le nom de Frauenkirch n’est pas à interpréter comme « église des femmes », mais comme « église Notre-Dame » (Unsere Liebe Frau). Cependant, la première interprétation, certes abusive, a donné lieu à la tradition selon laquelle l’église faisait partie d’un couvent de femmes. Or, il est vrai qu’autour des ruines de la Frauenkirch, nous retrouvons encore aujourd’hui des aménagements (terrasses, citerne, murets) qui suggèrent l’existence d’un ensemble architectural originel plus imposant.

La deuxième interprétation du nom de l’église, dédiée à Notre-Dame, a quant à elle étayé l’hypothèse d’un lieu de pèlerinage marial.

Il semblerait que l’église, jugée en mauvais état en 1570, ait été abandonnée à la Réforme. Toutefois, une dévotion y est rendue jusqu’à la fin du XVIIIe siècle. La Révolution Française mit très certainement un terme à la fréquentation religieuse de la Frauenkirch.

Il est intéressant de noter que l’église, selon Jérôme Anselme Siffer, était encore intacte dans les années 1800. On peut supposer que les pierres furent ensuite récupérées par les villageois, peut-être à la suite de l’effondrement du bâtiment.

C’est ainsi que l’église de la Frauenkirch a peu à peu disparu des mémoires, à mesure que disparaissaient ses ruines. C’est donc grâce au travail méticuleux de Jérôme Anselme Siffer qu’elle échappa à l’oubli complet.

 

Conclusion

La Frauenkirch offre au visiteur les minces ruines de sa grandeur passée. La mousse qui tapisse ses pierres dissimule à notre regard les vestiges, comme les légendes en dissimulent l’Histoire. Église de pèlerinage et ou conventuelle, elle trouve son origine au Bas Moyen Age. Abandonnée à mesure que s’installait le Protestantisme, le bâtiment tomba en ruine vers 1800. Aujourd’hui, le lieu conserve tout son mystère et son charme pittoresque. Les ruines invitent le passant à faire revivre l’Histoire de ce haut lieu de la spiritualité médiévale dans les Vosges du Nord.

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